Le photographe et artiste visuel basé à Gand, Marc De Blieck, a toujours maintenu une certaine ambivalence par rapport aux idées concernant le statut d’auteur.
En tant que créateur d’images aujourd’hui – nous vivons dans une époque où la photographie semble être devenue instantanée, omniprésente et, probablement, dans certains cas et selon les circonstances, superflue - l’artiste semble travailler d’un point de vue résigné en ce qui concerne la possibilité qu’une image puisse être originale.
En tant que créateur d’images aujourd’hui – on vit dans une époque où la photographie semble être devenue instantanée, omniprésente et, probablement, dans certains cas et selon les circonstances, superflue - l’artiste semble travailler d’un point de vue résigné en ce qui concerne la possibilité qu’une image puisse être originale.
En réactivant des paramètres de photographie oubliés, établis durant la seconde moitié du 19ième siècle – pas longtemps après l’invention de la photographie même – Marc De Blieck semble se mettre une camisole de force, en limitant volontairement sa liberté d’artiste. De plus, il paraît réduire d’avantage son élan, en limitant le sujet de ses images à des objets et des lieux de signification culturelle reconnues, en se cantonnant à des biens se trouvant sur la liste Unesco du Patrimoine Mondial. Ces lieux émergent selon des critères de sélection préétablis, que l’artiste accepte sans questionnements.
En théorie, on pourrait s’attendre à ce que cette approche réduise les chances de l’émergence d’une voix d’auteur. Mais, tout comme le diaphragme d’une caméra, qui, en devenant plus étroit produit des images plus nettes et avec d’autres profondeurs, Marc De Blieck laisse l’espace pour faire émerger d’autres aspects, en se plaçant volontairement « de côté ». Ainsi, avec une maîtrise technique (en cadrant et en coupant des lignes de vue spécifiques, des points de fuite et avec un soupçon de mise-en-abîme déconcertant) l’artiste rend explicite un vaste terrain photographique par lequel le spectateur est impliqué dans un dialogue visuel qui puise dans le subconscient collectif. En même temps, en tant que spectateur, nous devenons hyperconscients d’être des observateurs actifs, voire créatifs, en effectuant un cheminement à travers certaines lacunes que ces images mettent en lumière – des lacunes qui existent entre les images, les mots, la mémoire et les domaines qui se chevauchent entre le songe et la réalité.
Les sites de patrimoine culturel et les objets exposés dans des vitrines de musées représentés dans l’œuvre de Marc De Blieck réarticulent une mémoire archétypique, qui a des racines profondes, tandis que les appareils et les langages visuels qu’il déploie avec prouesse jouent sur nos sensibilités optiques.
Le sujet de la pratique artistique de Marc De Blieck pourrait alors être décrit comme monumental en au moins deux façons : au sens littéral, son approche met en lumière un immense patrimoine culturel humain partagé. Au sens éphémère, les œuvres nous rendent conscients, doublement, de nos tentatives de comprendre notre place dans ce monde et de nous-mêmes en tant qu’auteurs de nos propres expériences visuelles.
Il y a bien sûr un autre élément qui apparaît à travers les contrastes entre la lumière et l’obscurité, dans le rythme, les répétitions, les séquences dans l’accrochage qui contribuent au formalisme abstrait qui a lieu quand on retrouve les images imprimées, pliées, encadrées dans l’espace physique. Cet élément pose la question de ce qu’est la photographie, d’être auteur, et l’action de faire et de visiter des expositions, tout en nous laissant impuissants devant toute tentative d’enfermer ces aspects dans une définition cloisonnée.
K.C.M.
Avec des remerciements à la MEDAA pour leur accueil et à Sylvain Fasy.